Le yoga émerge maintenant assez facilement au sein de conversations. Souvent, ces dernières concernent essentiellement la dimension physique de la pratique, c’est-à-dire les asanas (postures de yoga). La dernière posture réussie, la capacité ou non à faire la posture sur la tête, la souplesse inaccessible semble souvent rendre compte de l’excellence d’un yogi ou non. C’est ce que l’on voit.
J’ai souvent entendu des yogi-en-devenir parler du calme désarmant des autres lors de moments de méditation. Ils ont ouvert l’oeil (car leur hamster dansait la samba) et les visages autour d’eux étaient d’un calme olympien.
Tout le monde était en apparence très calme.
La dimension visible du yoga est une infime fraction de ce qu’est réellement le yoga. Les fondements mêmes du yoga – les Niyamas et Yamas – sont d’abord invisibles. Les cultiver est un travail subtil, de soi à soi, que l’on ne peut démontrer. Être hyper performant dans la pratique physique de yoga, ne rend pas nécessairement compte d’une vie équilibrée ou d’un équilibre intérieur.
Aujourd’hui, on mesure souvent la réussite de quelqu’un à l’apparence de celle-ci : ce qu’il possède, ses résultats scolaires, ses performances physiques. Il plus facile de mesurer les résultats visibles parce qu’il suffit de les comparer avec les autres : plus flexible, plus avancé… que quelqu’un d’autre.
En réalité, chaque pratique, chaque cours est un pas concret vers l’harmonie en soi. Vous le découvrez tôt ou tard, derrière la pratique physique du yoga, il y a ce chemin vers soi, vers un sens de l’unité en soi. Derrière le visible du yoga, il y a l’essentiel.
Même lors de notre premier cours, on peut le sentir : la pratique du yoga a ce petit quelque chose de différent d’un cours d’aérobie (!). Si cela a lieu, la richesse de l’expérience révèle une science, un art, une sagesse qui va au-delà et passe au travers des mouvements physiques.
Cette grande profondeur de la pratique du yoga n’est pas réinventée par tous les enseignants de yoga. Elle prend racine entre autres dans une structure élaborée par un certain Patanjali dans des Yoga Sutras, textes rédigés ou compilés entre 200 avant J.-C. et 500 après J.-C.
Un Sutra est un aphorisme, une phrase qui s’autosuffit : vous ne devriez avoir besoin d’aucun support pour le comprendre. Pour moi, ce sont des énoncés qui se ressentent, qui ne se comprennent pas seulement avec notre esprit rationnel. C’est un peu comme un poème. Lorsque vous en relisez-un, votre ressenti se transforme un peu. Ce n’est pas toujours évident au début.
Cela fait en sorte que je ne les ai jamais lus d’un bout à l’autre ! Le livre qui les rassemble est déposé sur ma table de chevet. Je m’y plonge selon mes élans. Il y a 95 sutras.
Ce livre est un incontournable. C’est par les Sutras de Patanjali que l’on découvre que le yoga n’est pas seulement une technique physique (si un maître ne nous l’a pas enseigné directement). Il y a en réalité huit branches à la pratique du yoga et les asanas sont une de ces branches… c’est le un huitième du yoga !
Patanjali a systémisé le yoga, proposant un chemin vers l’unité intérieure et l’unité avec toute chose (ce qui est par ailleurs la même chose… 😉 ). Je disais huit branches, certains parlent de huit étapes, je dois dire que je ne suis pas vendue au mot « étape ». Cela crée trop de comparaisons : « À quelle étape es-tu rendu ? Moi à la quatrième, ma voisine à la cinquième… ». À mon avis, on les pratique toutes en même temps, à notre rythme, sauf peut-être les deux dernières qui demandent une préparation supplémentaire.
Voici ces huit branches, très légèrement résumées :
Vous connaissez déjà les asanas (dont j’ai parlé ici ) et le pranayama (dont j’ai parlé ici). Les Niyamas et Yamas sont les aspects les plus humbles de la pratique du yoga à mon avis. Beaucoup pratiquent souvent les asanas sans connaître leurs fondements éthiques. Ce n’est pas un problème en soi, mais si le chemin du yoga vous touche ils sont incontournables.
Déjà les mots « éthique » et « discipline » en font frissonner plus d’un. Tout comme moi, il y a quelques années, on imagine une longue liste des choses à faire et à ne pas faire, qui nous font avancer vers un idéal monastique. Hé non ! Enfin, pas nécessairement.
Ces préceptes nous disent qu’à la base nous sommes plein de compassion, généreux, honnêtes et paisibles. Ces préceptes révèlent les outils que nous avons en nous-mêmes pour cultiver cela.
Pour qu’ils fassent écho en nous-mêmes, il est important de se les approprier, de les apprivoiser pour soi. L’idée n’est pas de suivre un dogme, un idéal extérieur à vous-même, mais plutôt de répondre à ce qui résonne en vous, avec le meilleur de vous-même. Ces simples préceptes éthiques nous permettent d’être en paix avec nous-mêmes, notre famille et notre communauté.
Dans les dernières années, ces préceptes m’ont permis cultiver le meilleur de moi-même, de me poser certaines questions : Suis-je bienveillante ? Suis-je vraie avec les autres, avec moi ? Est-ce que je reste centrée quand tout s’agite ?
La manière dont vous parlez, dont vous traitez les autres et vous-mêmes, dont vous vivez devient votre fil conducteur. Par cela vous vous engagez à vivre selon vos plus profondes valeurs, vous vous transformez. Vous observez alors la différence entre l’apparence d’une transformation et la sensation de transformation. Le regard des autres n’est plus là pour vous la confirmer ou l’infirmer.
Les Yamas et Nyiamas se transposent alors dans tous les aspects de la vie, y compris dans la pratique des asanas ! 😉
Ce qu’ils ne sont pas :
Les Yamas, les principes éthiques, proviennent des caractéristiques principales des gens libres et heureux. C’est ce que les sages ont observés durant des centaines d’années, avant que Patanjali les mette. Ils observaient que voler à son voisin, médire de celui-ci ou mentir à ses amis n’allait pas de pair avec l’accroissement de la paix en soi-même. C’est aussi simple que cela.
Les Yamas se concentrent sur la manière dont nous utilisons notre énergie dans nos relations avec les autres et avec nous-mêmes.
Les Niamas sont des principes qui permettent de vivre en développant la bienveillance. Tout est une question de choix, ce dont vous vous nourrissez au quotidien a un impact sur vous-même.
*** J’ai ici tenté de résumer en une phrase chaque principe, c’est loin de rendre compte de la richesse de chacun d’entre eux. Je souhaitais les rendre plus abordables puisque leur traduction littérale est fort austère.
Dans les semaines qui viendront, je prendrai le temps de m’arrêter sur chacun de ces principes. Bien sûr, ils doivent être adaptés à notre quotidien, à notre époque et à nos hamsters tout-puissants intérieurs ! 😉 J’espère ces principes sauront accompagner votre quotidien et révéler une part de la dimension invisible du yoga.
9 Comments
J’aime beaucoup ton approche et ta définition de chacun de ces préceptes. J’ai hâte de lire la suite =)
J’en suis ravie !! Au plaisir de lire tes impressions sur la suite ! Merci Mlle Colibri (joli nom) ! 😉
Bonjour Noémie, tu viens de mettre une toute autre lumière au concept que je travaille depuis 4 semaines. Avec ton explication des yamas et niyamas, dans d’autres mots et avec un nouvel angle, cela me donne de nouvelles explications.
En apprentissage intense…formation 2015-2016…nouvelle recrue 🙂
Merci Mentor 😉
Ravie que ça éclaire ta compréhension Nathalie ! Bonne continuation ! 😉
Merci pour ce bel article plein de réflexions concises.je viens de lire les yogas sutras de Patanjali pour une formation de je débute en novembre et j’ai été conquise par la richesse de ces sutras.J’ai voulu prendre des notes (posséder )et j’ai presque recopié tout le livre.Toi tu as su en faire un bon résumé.Je me retrouve dans le niyama qui est d’admirer les petites choses les petits moments les coincidences.J’essaie de rester calme dans la tourmente en restant là (où tu vas tu es).Le chemin est savoureux.merci pour ton aide!
Noémie. Je te souhaite une lumineuse et créative année 2016. Garde cette belle énergie que tu sais partager et qui donne du Beaune au cœur. Bravo pour les niyamas et yamas. Justement j’en parle aussi autour de moi et à mes cours. Belle journee
Merci Caroline pour ce beau message ! Les Niyamas et Yamas sont souvent écartés quand on cherche à rendre le yoga plus accessibles, pourtant se sont les piliers d’une pratique de Yoga, sans cela elle n’est pas ancrée en dehors du tapis. C’est formidable que tu les enseignes si généreusement ! Belle journée toi !
Merci pour le partage.
Bonjour Noémie! Merci de partager toutes tes connaissances sur ton blog. C’est une excellente référence pour une débutante comme moi dans la pratique du yoga. J’aimerais en connaître d’avantages sur les écrits de Patanjali pour pouvoir appliquer ces principes au quotidien. Aurais-tu des lectures et des ouvrages à me proposer? Merci!